Histoire
La Croatie fut, tout au long de son histoire, au carrefour de quatre grands espaces culturels, ce qui confère une richesse à son patrimoine, tant architectural qu'artistique. Outre le caractère slave de ses habitants qui remonte à la fin du VIe siècle, la Croatie a subi les influences vénitiennes sur la côte dalmate d'une part, et les influences austro-hongroises dans les plaines du Nord de Slavonie et dans le bassin du Danube d'autre part. Cet héritage vient se superposer à celui préroman — romain et byzantin — plus diffus mais auquel elle doit sa tradition chrétienne. Le voisinage immédiat de l'Empire ottoman, du XVe au XIXe siècle, dont l'expansion s'est arrêtée en terre croate, a également eu son importance. Premier peuple slave christianisé, dès le début du VIIe siècle, les Croates sont encore aujourd'hui très majoritairement de confession catholique.
La Croatie contemporaine est également l'héritière du royaume croate médiéval, d'abord indépendant puis associé en 1102 à la couronne hongroise puis intégré, en 1527, aux terres des Habsbourg, devenues l'Autriche-Hongrie de 1867 à 1918. Au début du XVe siècle, la province côtière de Dalmatie devint vénitienne pour quatre siècles, puis française de 1809 à 1814, au sein des Provinces illyriennes qui mirent fin à la république de Raguse. Les Croates aspirèrent à la formation d'un royaume de Croatie-Slavonie-Dalmatie, dans le cadre de la monarchie austro-hongroise, mais l'accord austro-hongrois de 1867 laissa le royaume de Dalmatie à l'Autriche, tandis que le royaume de Croatie-Slavonie demeura en union personnelle avec la Hongrie, relation spécifique respectant les subjectivités politiques des deux royaumes, et comparable au lien unissant l'Écosse et l'Angleterre. La côte adriatique a longtemps été peuplée de colons italiens qui érigeront des villes en républiques indépendantes avant de se soumettre à Venise. Néanmoins ces Latins resteront principalement sur les côtes s'aventurant peu à l'intérieur des terres peuplées de Slaves.
Si les Croates ont toujours lutté, depuis la fin du XIe siècle, pour conserver leur autonomie, le sentiment panslave et yougoslave s'y développa à partir des années 1830. Le XXe siècle voit, pour la première fois, la Croatie unie à ses voisins slaves. De 1918 à 1941, c'est sous la forme d'un royaume centralisé sous le sceptre d'une dynastie serbe, au sein du royaume des Serbes, Croates et Slovènes, renommé royaume de Yougoslavie le 6 janvier 19297. En 1941, après l'invasion de la Yougoslavie par les forces de l'Axe, l'État indépendant de Croatie — État satellite de l'Italie et de l'Allemagne nazie — est mis en place par les envahisseurs et confié au mouvement indépendantiste et fasciste des oustachis, dirigés par Ante Paveli?. Les collaborateurs mettent en place une politique de persécution des populations serbes et juives et des résistants antifascistes croates, qui causa des dizaines de milliers de morts. Par rapport à la Croatie actuelle, cet État était amputé d'une partie de la Dalmatie et de l'Istrie (annexées par l'Italie), mais englobait la quasi-totalité de la Bosnie-Herzégovine. Parallèlement, et à la suite de l'insurrection antifasciste du 22 juin 1941, a été mis en place un Conseil antifasciste de la guerre de Libération de Croatie (en) (ZAVNOH). Véritable gouvernement de la « Croatie libre » contrôlant de vastes portions de l'État indépendant de Croatie, il rassemble la résistance croate au sein des partisans de Josip Broz Tito. Avec les partisans de Bosnie-Herzégovine, réunissant sept divisions, les partisans croates constituent dès 1943 la force principale de la résistance yougoslave, en comptant plus de 100 000 hommes répartis en onze divisions, sur un effectif total de 300 000 partisans yougoslaves organisés en 26 divisions. De ce fait, la Croatie est libérée en 1945 sans intervention alliée par les seuls partisans, contrairement aux régions orientales de la Yougoslavie (Voïvodine, Serbie), où les partisans reçoivent l'appui de l'Armée rouge. Dès novembre 1943, les partisans annoncent leur projet de mettre en place une nouvelle Yougoslavie qui serait fédérale. La république socialiste de Croatie devient un État fédéré au sein de la république fédérative populaire de Yougoslavie (de 1945 à 1963), puis de la république fédérative socialiste de Yougoslavie (de 1963 à 1990), composées de six républiques.
Dans la foulée de la chute du mur de Berlin et de l'effondrement du bloc communiste, les premières élections multipartites de Croatie sont organisées en avril-mai 1990. Elles voient la défaite du parti communiste et la victoire de l'Union démocratique croate, emmenée par l'ancien résistant et dissident Franjo Tu?man. À partir d'août 1990, une rébellion armée conduite par des miliciens séparatistes serbes éclate dans des régions croates à forte minorité serbe : de vastes zones du territoire croate sont soustraites au contrôle des autorités croates, avec l'appui de l'armée yougoslave qui s'interpose en protégeant les insurgés, qu'elle encadre et fournit en armes et munitions. Une « République serbe de Krajina » est proclamée le 16 mars 1991 sur près d'un tiers du territoire croate, et son rattachement illégal à la Serbie est proclamé le 1er avril 1991. Après le choc du massacre de douze policiers croates victimes d'une embuscade à Borovo Selo (en), le 2 mai 1991, puis du refus de la Serbie, le 15 mai suivant, de céder la présidence tournante yougoslave au représentant de la Croatie, le divorce est consommé, et c'est sans surprise que le 19 mai 1991 plus de 94 % des Croates se prononcent par référendum en faveur de la transformation de la Yougoslavie en confédération d'États souverains (proposition slovéno-croate), ou, en cas de refus de Belgrade, de l'indépendance pure et simple de la Croatie. Belgrade ayant rapidement rejeté toute proposition visant à démocratiser la fédération yougoslave, le 25 juin 1991 la Croatie est amenée, tout comme la Slovénie, à déclarer son indépendance. Le gouvernement fédéral yougoslave ne reconnut pas cette déclaration et, au nom de la préservation de l'État fédéral et de la minorité serbe de Croatie, mena une guerre avec l'armée yougoslave (4e armée européenne) et des groupes paramilitaires serbes. La Croatie fut reconnue internationalement le 15 janvier 1992. La nouvelle armée croate mena des opérations contre les forces de la République serbe de Krajina soutenues par l'Armée populaire yougoslave (JNA), notamment en 1995, les opérations Éclair (Operacija Bljesak) en Slavonie occidentale et l'opération Tempête (Operacija Oluja) pour reconquérir la République serbe de Krajina. Ces opérations se sont accompagnées de l'exode de 120 000 Serbes, principalement vers la Bosnie-Herzégovine et la Serbie, provoqué par l'évacuation forcée9 de la population civile ordonnée par les responsables séparatistes serbes. La Slavonie orientale et la Syrmie occidentale furent rendues pacifiquement à la souveraineté croate, en 1998.
L'élection du modéré Stjepan Mesi?, en 2000, à la suite du décès de Franjo Tu?man qui avait dirigé le pays au cours des dix années précédentes, a constitué un tournant politique et économique majeur. Le pays s'est démocratisé et s'est ouvert sur l'Europe ; les auteurs d'exactions pendant les conflits militaires ont été poursuivis. Le pays a mené une politique de privatisations et s'est ouvert aux investisseurs étrangers. Cela s'est fait, toutefois, avec de fortes résistances internes du fait de la présence de nationalistes extrémistes dans certaines structures de l'appareil d'État (défense) et dans certaines régions (Split). La Croatie s'est officiellement déclarée candidate, le 21 février 2003, à l'adhésion à l'Union européenne et le statut d'État candidat lui a été reconnu officiellement lors du Conseil européen des 17 – 18 juin 2004. L'ouverture des négociations d'adhésion avait, toutefois, été retardée jusqu'au 3 octobre 2005 du fait de la coopération jugée insuffisante de la Croatie, avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), en ce qui concerne l'arrestation de l'ancien général Ante Gotovina finalement arrêté en décembre 2005, pour en fin de compte être acquitté en appel en 2012. Le pays a rejoint l'OTAN dès 2009, soit seulement onze ans après le départ du dernier casque bleu (de Slavonie orientale).
Politique
La Croatie est une république parlementaire, démocratique et multi-partite. Elle a déjà connu trois alternances depuis son indépendance, même si la décennie 1990 – 2000 a été dominée par l'Union démocratique croate (HDZ) et Franjo Tu?man. La déclaration d'indépendance a eu lieu en 1991.
Le président de la République de Croatie (Predsjednik) est le chef de l'État ; il est également le chef des armées et il a le devoir de désigner le président du gouvernement (le « Premier ministre ») avec l'accord du Parlement. Il a également une certaine influence sur la politique étrangère. Le président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois.
Le Parlement croate, la Diète (Sabor) est un Parlement monocaméral composé de 153 députés (140 élus dans dix circonscriptions, 10 par les minorités ethniques, 3 par la diaspora) élus pour une législature de quatre ans. Les sessions ordinaires se déroulent du 15 janvier au 15 juillet et du 15 septembre au 15 décembre.
Le gouvernement croate (Vlada) est dirigé par le président du gouvernement (couramment qualifié de « Premier ministre » dans les médias croates et étrangers) et se compose de vice-présidents et de ministres en nombre variable. Le pouvoir exécutif a la charge de proposer des lois et un budget, de veiller à l'application des lois et de guider la politique intérieure et étrangère.
En 2000, le social-démocrate Ivica Ra?an devient président du gouvernement, tandis que Stjepan Mesi? est élu président de la République, ce qui marque la première véritable alternance. Bien que la HDZ revienne au pouvoir dès 2003, le virage pro-européen pris par son président, Ivo Sanader, marque une nouvelle alternance. Lors de l'élection présidentielle du 16 janvier 2005, Stjepan Mesi? a été réélu au second tour pour un second mandat présidentiel face à Jadranka Kosor avec plus de 60 % des suffrages. Celle-ci a succédé à Ivo Sanader à la tête du gouvernement en 2009.
La Croatie a obtenu, le 17 juin 2004, le statut de candidat à l'Union européenne et le Conseil de l'Union européenne a reconnu, le 3 octobre 2005, qu'elle remplissait l'ensemble des conditions pour lancer les négociations d'adhésion. Ceci n'a été possible qu'après que le gouvernement croate a accepté de mieux coopérer avec le TPIY. La Croatie est également membre de l'OTAN. Elle a par ailleurs obtenu au Sommet de Ouagadougou en novembre 2004 le statut d'observateur au sein de l'Organisation internationale de la francophonie, malgré le faible nombre de personnes parlant le français.
Le 27 décembre 2009, la Croatie entreprend une élection présidentielle. Les résultats sont connus le 10 janvier 2010, Ivo Josipovi? remporte le second tour avec 60,29 % des voix, contre le maire de Zagreb, Milan Bandi? (39,71 %). Environ deux ans plus tard, aux élections législatives du 4 décembre 2011, une alliance de centre-gauche conduite par le Parti social-démocrate de Croatie (SDP) remporte la majorité absolue des sièges, permettant la nomination de Zoran Milanovi? comme président du gouvernement.
L'élection présidentielle croate de 2014 – 2015 s'est déroulée les 28 décembre 2014 et 11 janvier 2015. Au premier tour, le président sortant Ivo Josipovi? obtient 38,56 % des suffrages contre 37,08 % à Kolinda Grabar-Kitarovi?, ancienne ministre des Affaires étrangères.
Au second tour, Kolinda Grabar-Kitarovi? est élue avec 50,4 % des voix contre 49,6 % à Ivo Josipovi?.
Adhésion à l'Union européenne
Après la clôture de ses négociations d'adhésion à l'UE, le 30 juin 2011, le référendum du 22 janvier 2012 a donné le feu vert à l'intégration dans l'Union européenne12. Le traité d'adhésion, que la Croatie et l'UE ont signé en décembre 2011, fut approuvé par le Parlement européen et ratifié par chacun des vingt-sept États membres et par le Parlement croate, entérinant son adhésion à l'Union européenne, qu'elle intègre officiellement le 1er juillet 2013. Quant à son adoption de l'euro, si elle est prévue, aucune date n'a encore été fixée.
Le processus d'adhésion, qui a duré dix ans, a abouti le 1er juillet 2013, faisant de la Croatie le 28e État membre, marquant une étape importante pour ce pays dont le PIB par habitant représente 61 % de la moyenne du continent13, lui ouvrant la voie au marché commun européen et la poussant à renforcer ses exportations et son attractivité.