Slobodan Miloševi?
Slobodan Miloševi?, né le 20 août 1941 à Požarevac (Yougoslavie, aujourd'hui en Serbie) et mort en prison le 11 mars 2006 à La Haye (Pays-Bas), est un homme d'État yougoslave.
Fondateur du Parti socialiste de Serbie, il est président de la Serbie de mai 1989 à juillet 1997 et président de la République fédérale de Yougoslavie de juillet 1997 à octobre 2000. Durant ces périodes, ont lieu les guerres de Yougoslavie, qui mettent fin à la République fédérative socialiste de Yougoslavie. Slobodan Miloševi? et le Croate Franjo Tu?man sont les principaux artisans du renouveau du nationalisme.
Il est accusé auprès du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) de La Haye pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité et génocide. Il est mort pendant la cinquième année de son procès, d'un infarctus du myocarde sans qu'aucun jugement n'ait été rendu, sa mort entrainant l’arrêt du procès.
Biographie
Slobodan Miloševi? est le fils de Svetozar Miloševi?, un prêtre orthodoxe monténégrin, et de Stanislava Miloševi? (née Koljenši?), une enseignante et membre active du Parti communiste. Il a un frère aîné Borislav (1934-2013) qui deviendra diplomate. Ses parents se séparent peu après la fin de la Seconde Guerre mondiale, et plus tard se suicideront, son père par arme à feu en 1962, sa mère par pendaison en 1974.
Miloševi? épouse Mirjana Markovi? en 1965 alors qu'ils sont tous deux à l'université de Belgrade. De leur union naissent deux enfants, Marko et Marija.
Début de carrière politique
Il rejoint dès 1959 la Ligue des communistes de Yougoslavie. En 1964, il termine ses études de droit à la Faculté de droit de l'université de Belgrade, et travaille d'abord dans l'industrie (compagnie publique de gaz Technogaz), puis dans la finance où il exerce jusqu'en 1983 la fonction de directeur de la Beogradska banka (Beobanka, Banque de Belgrade).
Alors que Slobodan Miloševi? apparaît comme un homme à tempérament introverti, piètre orateur et sans charisme particulier, il devient en 1984 chef de la section de Belgrade au Parti communiste. Sa carrière politique de premier plan commence en 1986, quand il remplace Ivan Stamboli? à la tête du Praesidium du Comité central de la Ligue des communistes de Serbie. Il est réélu en 1988. En mai 1989, il est élu président de Serbie et avance ses idées prônant un nationalisme ethnique[réf. souhaitée]. Le 28 juin 1989, pour le 600e anniversaire de la bataille de Kosovo Polje, il fait un discours au Kosovo, sur le site de la bataille (parfois surnommé le "Champ des Merles" en français), devant plusieurs centaines de milliers de personnes, dans lequel la commémoration de l'événement historique est l'objet d'une réécriture de l'histoire à des fins nationalistes. D'une part, à l'échelle de la Yougoslavie, où ce discours est observé par les autres Républiques, qui y voient a minima une provocation, voire un grand danger. Pour beaucoup d'observateurs, ce discours est un événement-clef dans la chronologie des guerres de décomposition de la Yougoslavie, ayant notamment participé d'enclencher les processus de référendums d'autodétermination en Slovénie et en Croatie. D'autre part, à l'échelle de la Serbie, ce discours expose les idées nationalistes de Slobodan Miloševi?, notamment à l'égard des Albanais du Kosovo (peuple non slave, à majorité musulmane mais avec une importante minorité catholique, de l'ordre de 20 % de la population), et entérine l'abolition du statut autonome du Kosovo. Ainsi, la Constitution de la Yougoslavie de 1974 (sous Tito) transforme le Kosovo en province autonome (auparavant il s'agissait d'une province) et lui accorde plus de droits, tout en maintenant ce territoire sous la responsabilité de la République de Serbie (tout comme pour la Voïvodine). Miloševi? proclame l'état d'urgence au Kosovo, ce qui restreint ces droits acquis par le Kosovo en 1974 (mais ce qui est aussi légalement prévu par la Constitution). Le communisme étant en déliquescence dans tous les pays de l'Europe de l'Est, il transforme en 1989 le Parti communiste yougoslave en Parti socialiste. Il préside également au changement de constitution qui donne au président un pouvoir accru. Dans l'opposition, certaines voix commencent à s'élever contre la menace nationaliste (Cercle de Belgrade), mais le 20 décembre 1992, il est réélu à la présidence, cette fois au suffrage universel direct.
Guerres en Yougoslavie
Le 25 juin 1991, la Croatie et la Slovénie, « États indépendants et souverains » aux termes de la Constitution yougoslave titiste du 21 février 1974, déclarent leur indépendance de la République fédérative socialiste de Yougoslavie, après des référendums d'autodétermination ; lorsque la dissolution de cette fédération aura été constatée en janvier 1992, la Macédoine et la Bosnie-Herzégovine refuseront de rejoindre l'union de la Serbie et du Monténégro que Miloševi? a constituée en avril 1992 sous le nom de République fédérale de Yougoslavie.
Miloševi? entreprend alors de modifier par la force les frontières de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine, en invoquant la présence de minorités serbes immigrées à partir du XVe siècle en Croatie et en Bosnie et non assimilées ; ces frontières ont été définitivement fixées en 1945 mais datent pour l'essentiel de plus de deux siècles, et la Constitution de 1974 précise que c'est « dans le cadre des républiques et des provinces autonomes » que les « peuples et les nationalités » exercent leurs « droits souverains ».
Miloševi? lance donc deux guerres successives : la première, à l'été de 1991, contre l'État de Croatie, la deuxième, en mars 1992, contre l'État de Bosnie-Herzégovine, derrière le prétexte d'une « insurrection locale » des Serbes contre le gouvernement légal.
La guerre en Bosnie culmine au massacre de Srebrenica en juillet 1995, perpétré par des forces serbes contre des Bosniaques et qui précipitera l'intervention de l'OTAN. L'organisation Médecins du monde répand des affiches représentant Miloševi? en Hitler. Thierry Wolton fait remarquer que cette assimilation était fallacieuse, Miloševi? étant communiste et se situant donc dans la tradition de Staline et non d'Hitler.
En Croatie, le président Franjo Tu?man lance l'opération Tempête contre les Serbes vivant en Slavonie orientale et dans la région de Krajina. Cette opération fera plus de 200 000 réfugiés serbes et engendrera de nombreux crimes de guerre. Les armées serbes sortent affaiblies de ces événements, et les accords de Dayton de décembre 1995 mettent un terme à la guerre en Bosnie-Herzégovine et en Croatie.
Après les accords de Dayton, la population de Serbie lui demande des comptes et vote contre lui : son parti perd les élections municipales de novembre 1996, et l'opposition devra manifester jour et nuit jusqu'en février 1997 pour qu'il finisse par reconnaître les résultats. En juillet 1997, Miloševi? est néanmoins élu à la présidence de la « République fédérale de Yougoslavie » (RFY).
La répression serbe de la guérilla de l'UÇK au Kosovo finit par convaincre les dirigeants occidentaux, après l'échec de la conférence de Rambouillet, que l'action militaire contre Miloševi? est nécessaire. Le 24 mars 1999, l'OTAN ordonne, contre l'opposition de la Russie au conseil de sécurité de l'ONU, des frappes aériennes contre la RFY. Ces frappes forcent Miloševi? à signer les accords de Kumanovo du 10 juin 1999, où il s'engage à retirer ses troupes. Le même jour, le Conseil de Sécurité de l'ONU vote la Résolution 1244, qui prévoit une administration provisoire de l'ONU (MINUK) et une présence militaire dirigée par l'OTAN (KFOR). Au Kosovo, l'action des forces serbes serait responsable de 2 000 morts civils et 300 000 réfugiés.
Devant le Tribunal pénal international
En septembre 2000, il est battu à l’élection présidentielle fédérale par Vojislav Koštunica et son régime est renversé en octobre 2000 (5 octobre 2000 en Serbie). Sous la pression d'un ultimatum américain fixant au 31 mars la date limite exigeant l'arrestation de Slobodan Miloševi? sous peine de sanctions économiques, la justice serbe le somme de se rendre. Les forces spéciales de la police donnent l'assaut le 31 mars 2001 mais les gardes du corps et les partisans de l'ancien président serbe parviennent à résister. Et ce n'est qu'après un siège de 33 heures, organisé par la police, qu'il se rend aux autorités. Il est arrêté le 1er avril 2001 pour abus de pouvoir et corruption et est livré à l'ONU par le gouvernement serbe en juin 2001. Son procès, qui a débuté le 12 février 2002, le fait comparaître devant le TPIY pour crimes contre l'humanité, infractions graves aux Conventions de Genève et violation des lois ou coutumes de la guerre. L'avocat français Maître Jacques Vergès qui avait offert ses services, n'a pas été retenu comme défenseur par l'accusé.
La nature du procès et sa méthodologie sont contestées par certains observateurs ; Russia Today dénonce un « simulacre de procès » dans lequel l'accusation reposait plus sur des considérations géopolitiques que sur des preuves, et la diabolisation faite par la majeure partie des médias occidentaux de Miloševi?. L’hebdomadaire britannique Sunday Times estime quant à lui que plus de 80 % des déclarations de l’accusation auraient été rejetées par un tribunal britannique comme étant de simples ouï-dire.
En février 2007, la CIJ jugea la Serbie non coupable de génocide, et conclut que le gouvernement de Belgrade n'avait pas planifié le massacre de Srebrenica (le plus grave épisode figurant dans l'acte d'accusation). Cependant le président de la CIJ déclara que Miloševi? était au courant des risques de survenance de massacres en Bosnie et n'avait rien fait pour les éviter.
En août 2016, une rumeur9 affirme que Slobodan Milosevic aurait été blanchi par le TPIY. Une affirmation démentie par le TPIY auprès du Monde ainsi que dans une tribune sur Al Jazeera . Le tribunal ayant seulement indiqué dans le cadre du procès de Karadzic « qu’il n’y a pas suffisamment de preuves dans ce dossier pour constater que Slobodan Miloševi? avait donné son accord au plan commun qui visait à expulser définitivement les Musulmans et les Croates de Bosnie du territoire revendiqué par les Serbes de Bosnie », le jugement concerné indiquant en outre qu'il avait « coopéré étroitement avec l’accusé pendant cette période [où les crimes ont été commis] ».
Mort
L'état de santé de Miloševi? marque la fin du procès. Des demandes répétées de Miloševi? d'être soigné en Russie sont rejetées par le tribunal, bien que la santé du prévenu, qui assure lui-même sa défense, rende difficile la continuation du procès.
Miloševi? meurt au centre de détention des Nations unies à La Haye (dans le quartier de Scheveningen), le 11 mars 2006, avant la fin de son procès. Les premières annonces indiquent que sa mort est naturelle. Il souffrait de problèmes cardiaques et d'hypertension. Toutefois, une autopsie complète et des analyses toxicologiques ont été demandées afin d'établir avec certitude les causes de sa mort. Il avait déclaré au mois de février à ses avocats craindre un empoisonnement.
Son conseiller juridique, qui a montré un document de six pages, a affirmé que l'ancien président a écrit une lettre la veille de sa mort dans laquelle il a affirmé que des traces d'un « médicament puissant » destiné au traitement de la lèpre ou de la tuberculose avaient été détectées dans son sang en janvier. Il y affirmait être très inquiet et avoir peur que l'on tente de l'empoisonner.
Selon le résultat du rapport d'autopsie publié le 12 mars dans la soirée, Slobodan Miloševi? est décédé d'un infarctus du myocarde. Le 17 mars, le TPIY exclut définitivement la thèse de l'empoisonnement dans un nouveau rapport d'analyses toxicologiques affirmant qu'aucun poison, médicament ou substance étrangère susceptible d'avoir provoqué la mort n'a été retrouvé.
Après qu'il a été envisagé de l'inhumer en Russie ou à Belgrade, ce qui a suscité quelques controverses, Miloševi? est finalement inhumé le 18 mars dans sa ville natale de Požarevac. Un hommage a cependant lieu préalablement à Belgrade en présence de plus de 50 000 partisans et de nombreuses personnalités politiques et culturelles occidentales (opposants à l'OTAN) qui l'ont toujours soutenu.